« Est-ce de ma faute si je n’arrive pas à sortir d’une relation toxique ? Pourquoi est-ce que je n’arrive pas à avancer, maintenant que je l’ai quitté ? » Voici des questions que tu te poses peut-être si tu n’arrives pas à faire de changements dans ta vie. Culpabilité ? Responsabilité ? Tu oscilles peut-être entre les deux sans être sûre que tu sais faire la différence.
Tu as peur de reproduire les schémas toxiques, mais tu ne parviens pas à faire la part des choses entre ce qui est ta faute et ce qui ne l’est pas. J’ai une bonne nouvelle pour toi si tu ne peux pas t’empêcher de se sentir coupable. Ce n’est pas de ta faute si c’est si difficile de faire des changements ! Les découvertes en neurosciences nous permettent désormais de faire la différence entre ce qui est fonctionnel (comment notre cerveau travaille) et ce qui est de notre ressort (le pilote aux commandes)… Et pour ce qui est en notre pouvoir, je laisse la deuxième bonne nouvelle pour la suite de l’article (clin d’œil 🙂
À qui la faute ?
Pour bien répartir les rôles et comprendre ce qui est « de notre faute » et ce qui ne l’est pas, nous devons faire un peu de biologie…
Dans le livre « How emotions are made », la neuropsychologue Lisa Feldman Barrett explique comment nos émotions sont générées au niveau des neurones. Et ce faisant, elle met en lumière comment notre cerveau crée tous nos comportements. (Nos pensées créant nos émotions, et nos émotions générant nos actions, les trois sont logiquement liés dans une chaîne de cause à effet. Nos pensées sont donc à l’origine de tous nos résultats)
La psychologue est spécialisée dans les recherches sur les émotions : d’où viennent-elles, comment les interprétons-nous, comment se manifestent-elles dans notre corps. Elle démontre, grâce à ses recherches, le lien serré entre les fonctions physiologiques et mentales du cerveau.
Le premier élément est donc de comprendre comment notre cerveau fonctionne.
Tout ce que notre cerveau fait est « prédictif ». Pour illustrer ce point, je vais prendre un exemple :
- Tu conduis ta voiture.
- Tu vois un ballon qui traverse la route,
tu freines parce que ton cerveau prévoit qu’il y aura peut-être un enfant qui court après le ballon. - Tu n’en sais rien (= ce n’est pas une certitude), c’est uniquement une prédiction.
- Donc, tu freines, tu regardes, pas de gamin, ton cerveau ajuste ton comportement à la réalité :
- « Pas d’enfant, je peux accélérer ».
Ce processus est similaire à ce qui se passe dans notre cerveau, des milliers de fois, à la nanoseconde. C’est ainsi qu’il traite toutes les informations que nous recevons de notre environnement, de l’intérieur de notre corps, de nos interactions avec notre entourage. Donc, son fonctionnement de base, c’est :
1) prévoir ce qui va se passer,
2) puis ajuster à la réalité au fur et à mesure que les stimuli internes et externes confirment ou infirment la prédiction,
3) répéter le processus, encore et encore,
4) stocker l’information pour pouvoir répéter à l’infini.
C’est ainsi qu’il lance nos émotions et nos actions ou comportements.
Or, et c’est là, le détail crucial : pour faire ses prédictions, notre cerveau se base sur
- tout ce qu’on a appris depuis qu’on est enfant,
- tout ce qu’on a vécu, pensé et ressenti,
- tout ce qu’on a fait et répété.
Cela signifie que pour prédire l’avenir, il se base sur le passé.
La répétition des schémas toxiques
Voici donc le deuxième point : si tu reproduis des schémas, bien qu’ils ne te semblent pas sains, ou si tu ne réussis pas à modifier ton mode de pensée ou tes réactions bien que tu aies décidé de faire des changements : ce n’est pas de ta faute.
C’est véritablement comme cela que nous sommes « cablés ». Notre cerveau est programmé pour faire toujours la même chose. Il sait adapter en fonction des informations qui lui parviennent. Mais à part cela, il est un pro de la répétition ! Ses trois missions principales sont :
- rechercher le plaisir
- éviter ou minimiser la douleur
- économiser l’énergie.
Changer ses habitudes, cela demande de l’effort (et ça peut être douloureux) : donc le cerveau ne choisira pas cette option. Par défaut, il préférera toujours faire ce qu’il a toujours fait.
Cela peut paraître catastrophique : « Oh mon Dieu, c’est programmé dans mon cerveau, je ne peux rien faire ! » Mais ce n’est pas le cas, parce qu’en fait, c’est nous qui avons mis en place cette programmation (bien qu’inconsciemment). Ce qui m’amène au troisième point.
Tu peux changer le fonctionnement de ton cerveau
Contrairement à ce qu’on pensait avant les découvertes neuroscientifiques, notre cerveau est capable d’apprendre de nouvelles choses tout le temps. Ça s’appelle la neuroplasticité. C’est-à-dire que nous pouvons changer les pensées automatiques telles que :
Ballon qui traverse la route => peut-être enfant => freiner
Puis, pas d’enfant => j’accélère.
Bon, celle-ci est une automatisation que nous ne souhaitons probablement pas modifier ! Par contre, quand il s’agit de pensées automatiques qui ne créent pas les résultats que nous voulons, quand il s’agit de pensées, d’émotions ou de comportements dont les effets sont négatifs dans notre vie : nous pouvons créer de nouveaux circuits = de nouveaux comportements.
Le troisième point, très important, est de comprendre que reprendre les commandes de ton cerveau, c’est ça, ta responsabilité.
- Il n’y a que toi qui puisses observer les schémas que tu as créés.
- Il n’y a que toi qui puisses choisir de faire des changements (et décider lesquels tu désires).
- Toi seule peux faire le travail nécessaire pour créer des nouvelles pensées et des nouveaux comportements.
Ceci est ma deuxième bonne nouvelle ! Parce que si on pense que pour changer, quelque chose doit se passer à l’extérieur de nous, nous n’avons aucun contrôle, aucun pouvoir. Nous sommes foutues.
Quand nous comprenons que nous pouvons identifier nos schémas répétitifs et quand nous voyons que nous détenons le pouvoir de changer notre côté de l’histoire, nous avons les pleins pouvoirs sur notre destin.
Comment faire pour repérer et changer tes schémas répétitifs ?
Je t’invite à faire un petit travail d’introspection (et d’autocritique) :
- choisis une situation que tu déplores, mais dans laquelle tu reproduis les mêmes comportements,
- écris une demi-page à une page sur le sujet : ce qui se passe, ce que tu penses, avant, pendant, après. Les émotions que tu ressens. Ce que tu fais et ne fais pas. Les résultats de ces comportements dans ta vie.
- sépare bien les faits (circonstances neutres = les actions des autres, le passé, les circonstances extérieures) de tes pensées (optionnelles)
- place ces informations dans un Modèle de Brooke pour mettre à jour le mécanisme de cause à conséquences (de Pensée à Résultat)
Exemple :
Si j’ai appris à mon cerveau que je dois m’excuser quand telle personne se met à crier, c’est ce que mon cerveau, en pilote automatique, fait. Quand je comprends que je peux choisir un nouveau comportement, et que par l’entraînement et la répétition, je vais faire de ce nouveau schéma, choisi intentionnellement, ma nouvelle norme : je peux vraiment changer ma vie. En commençant par choisir de ne pas m’excuser quand j’estime n’avoir commis aucune offense, par exemple.
Dans le Modèle de Brooke :
C : Untel crie
P : « Ça va encore recommencer, je n’en peux plus »
E : Défensive
A : Je m’excuse
R : Je « recommence » et je perpétue le cycle d’excuses
Mon levier est toujours au niveau de ma Pensée (car toutes les pensées sont optionnelles) et nous ne pouvons pas changer les Circonstances, car elles ne dépendent pas de nous.
Une option intentionnelle pourrait être :
C : Untel crie
P : « J’ai posé mes limites et j’ai dit ce que je ferai s’il crie »
E : Respectueuse
A : Je sors de la pièce
R : Je mets mes limites en application et je regagne mon respect
(Exemple pris de l’article sur “Comment poser des limites“)
Je t’invite à véritablement prendre ton sort en mains. Observe ce qui se passe dans ta vie. Repère les schémas que tu n’as plus envie de reproduire et commence à faire le travail pour décomposer ce qui ne te plaît pas et analyser comment le changer. En procédant ainsi, tu orientes tes actions dans la direction que tu as choisie (et non pas au bonheur la chance). Que ce soit des petites choses à l’intérieur de la relation, que ce soit la relation en entier, le Modèle s’applique de la même manière (mais je recommande de commencer avec des problèmes « simples »). Que ce soit ta réaction de panique quand tu reçois un texto, ton agacement quand ton ex change les plans, ta peur de retomber dans son filet (ou celui d’un autre) : tu es tout à fait capable de faire ces changements et d’apprendre à ton cerveau à fonctionner autrement.
Donc tu n’es pas coupable.
Tu es responsable.
Et il n’y a rien de plus beau qu’être responsable de sa propre vie !
Comment faire ce travail ?
- Sois une « bonne sceptique » : ne te dis pas que ça ne marche pas sans avoir essayé, en t’engageant vis-à-vis de toi-même à mettre en place un petit changement et à le répéter de manière constante tous les jours pendant un mois.
- Identifie les mécanismes que tu veux changer : les émotions dont tu veux te débarrasser, les comportements que tu veux changer, les résultats que tu souhaites et que tu n’obtiens pas.
- Choisis tes priorités et commence « petit ». Donne-toi un objectif précis : par exemple, ne plus répondre au quart de tour quand tu reçois un texto, écrire des lignes de gratitude tous les soirs, faire une routine de préparation pour être sur un alignement neutre ou positif quand tu vas chercher tes enfants chez ton ex.
Pour travailler :
En solo :
- Toutes les pistes de développement personnel qui te conviennent en n’oubliant pas le principal : appliquer.
- La rubrique « se reconstruire » sur ce blog et notamment le Modèle de Brooke.
En accompagnement :
- Avec un coach dont les méthodes te plaisent.
De petits changements, presque insignifiants, mais réussis, nous donnent la preuve de la malléabilité de notre cerveau et de notre pouvoir à le contrôler.
Leur accumulation crée de réelles transformations dans notre vie. Ces changements se manifestent de manière concrète, bien sûr. Mais surtout, ils nous aident à développer notre confiance en nous et en notre capacité à gérer notre destin.
C’est notre responsabilité.
Nous en sommes capables.
Et tant mieux.
Nous le méritons bien !